Diriger dans l’incertitude, c’est accepter l’idée que le risque n’est jamais loin, que chaque décision peut être celle qui sauve ou celle qui fait plier l’entreprise. Alors que les crises se succèdent et que les repères deviennent flous, il devient urgent pour les dirigeants de savoir anticiper, mais aussi d’agir sans hésiter. Comment gérer un environnement où la prochaine perturbation est aussi imprévisible qu’inévitable ? Face à ce défi, Arnaud Marion, expert reconnu en redressement d’entreprise, et fondateur de l’Institut des Hautes Études en Gestion de Crise (IHEGC) propose une méthodologie spécifique : agir vite, prévenir les pièges les plus fréquents, et faire de la résilience un atout compétitif.
Avec ses ouvrages « Partout où je passe, les mêmes erreurs » (Eyrolles, 2020) et « 21 semaines pour se relever de la crise » (Eyrolles, 2021), Arnaud Marion partage les enseignements tirés de ses interventions auprès de dirigeants confrontés à l’urgence.
Cet article vous dévoile les pratiques et les outils concrets qu’Arnaud Marion recommande pour permettre aux dirigeants de s’armer face aux imprévus.
Pourquoi les dirigeants doivent-ils anticiper les risques en période d’incertitude ?
Les entreprises évoluent aujourd’hui dans un contexte instable. Pour les dirigeants, anticiper les crises potentielles est devenu essentiel pour protéger et faire croître leurs organisations. La capacité d’identifier les signaux faibles permet de prévenir l’impact des perturbations avant qu’elles ne deviennent incontrôlables. Selon une étude de PWC, 89 % des dirigeants considèrent la résilience comme une priorité stratégique, un chiffre qui traduit l’importance de cette vigilance dans l’économie actuelle.
Anticiper une crise, c’est savoir reconnaître les signes discrets qui en annoncent l’arrivée. Souvent, les changements se manifestent par des indices subtils : fluctuations dans les habitudes des clients, tensions au sein de la chaîne d’approvisionnement, évolutions technologiques. Arnaud Marion recommande de mettre en place une équipe de veille dédiée, chargée de suivre ces indicateurs et d’informer la direction avant que la crise ne s’impose. Cette veille proactive, ou « système nerveux » de l’entreprise, permet de réagir avant que la situation ne devienne critique.
Analyser les erreurs courantes en gestion de crise
Dans son livre « Partout où je passe, les mêmes erreurs », Arnaud Marion identifie les erreurs fréquemment commises en gestion de crise : méconnaissance des signaux faibles, confiance excessive dans les indicateurs financiers ou négligence des retours d’expérience. Pour éviter ces pièges, il propose une approche structurée : documenter chaque crise et en tirer des leçons systématiques. Un retour d’expérience rigoureux permet d’enrichir la stratégie de gestion de crise et d’éviter de répéter les mêmes erreurs. Arnaud Marion insiste sur ce point : « La crise surgit souvent là où on ne l’attend pas, mais ses signes sont presque toujours perceptibles ».
Comment développer une stratégie agile face aux incertitudes du marché ?
Dans un contexte incertain, les plans rigides deviennent vite obsolètes. La capacité à s’adapter en temps réel est cruciale. Arnaud Marion conseille aux dirigeants de construire des stratégies modulables, capables de répondre aux changements soudains sans perturber la stabilité de l’entreprise.
Mettre en place une stratégie flexible et adaptable
Pour qu’une stratégie soit réellement agile, elle doit pouvoir s’ajuster rapidement. Arnaud Marion propose la mise en place de « plans d’action agiles », qui intègrent des options de contingence prêtes à être activées en cas de perturbation. Inspiré des pratiques militaires, ce type de plan repose sur une hiérarchisation des priorités et une anticipation des scénarios possibles. Cela permet aux dirigeants d’activer les bons leviers au bon moment.
Favoriser l’agilité dans la culture d’entreprise
L’agilité ne doit pas être l’apanage de la direction : elle doit infuser toute l’organisation. Arnaud Marion recommande de favoriser l’autonomie des équipes et de simplifier les processus de décision pour que chaque collaborateur puisse agir rapidement. Les entreprises les plus résilientes fonctionnent comme des écosystèmes où chaque membre est habilité à réagir. La création de « cellules de décision rapide », composées de représentants des départements clés, aide à garantir une prise de décision collective et instantanée en cas d’urgence.
Quels outils pour prendre des décisions éclairées malgré la pression ?
La prise de décision en situation de crise est une compétence qui repose sur l’organisation et l’analyse rapide des données. Pour Arnaud Marion, un bon dirigeant doit structurer ses décisions en trois étapes pour en garantir la rigueur, même sous la pression : évaluer les options, mesurer les risques et les bénéfices, puis valider avec un collaborateur ou un conseiller clé. Cette méthodologie permet d’éviter les biais et d’apporter une perspective critique. Ce système s’inspire des pratiques de gestion de crise militaire, où chaque décision est doublée d’une évaluation rapide par un binôme de confiance.
Développer des indicateurs pour guider les décisions critiques
Un tableau de bord stratégique dédié à la gestion de crise est essentiel pour une prise de décision efficace. En centralisant des indicateurs clés comme la trésorerie disponible, la satisfaction client et les stocks critiques, les dirigeants peuvent réagir rapidement aux imprévus grâce à des données claires et actualisées. Arnaud Marion recommande cet outil de suivi en temps réel, qui offre une vision précise de l’état de l’entreprise et permet de cibler les actions prioritaires. Environ 60 % des entreprises ayant adopté une gestion de crise centralisée constatent une réactivité accrue, soulignant l’importance de disposer d’outils adaptés.
Comment transformer les équipes en période de crise ?
Communication transparente et proactive
La transparence est essentielle pour renforcer la confiance des équipes et des partenaires externes en période de crise. Pour Arnaud Marion, les dirigeants doivent éviter les communications génériques et adopter une approche en trois étapes : informer, rassurer et expliquer les actions en cours. Lors de la crise du COVID-19, plusieurs entreprises ont intégré ce modèle et constaté une amélioration de l’engagement de leurs équipes. Ce type de communication aide à clarifier les responsabilités et à maintenir la cohésion.
Anticiper et agir dans l’incertitude nécessite une approche structurée, pragmatique et flexible. Arnaud Marion, avec sa méthode basée sur l’agilité et l’engagement des équipes, montre aux dirigeants qu’une crise, dans le cadre du management de crise, peut devenir une opportunité de renforcement. En intégrant des outils adaptés et en cultivant une culture de résilience, les entreprises peuvent transformer les défis imprévus en leviers de croissance.